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La lévothyroxine comme traitement de certains troubles du comportement

La lévothyroxine comme traitement de certains troubles du comportement

6 juillet 2019

Les hormones ont une influence sur le comportement d’un individu comme l’ont montré de nombreuses études. En particulier, les hormones thyroïdiennes qui ont une action métabolique générale agissent sur le fonctionnement du système nerveux central en modifiant la transmission des neurotransmetteurs, de la sérotonine et de la noradrénaline en particulier.

En pathologie comportementale canine, il est courant de suspecter une hypothyroïdie quand le chien présenté pour troubles du comportement montre en plus des signes cliniques évoquant une hypothyroïdie (signes dermatologiques, métaboliques, nerveux, troubles de la reproduction…). La suspicion est aussi renforcée quand les psychotropes administrés n’induisent pas les effets escomptés.

 

Limite du diagnostic biologique

Cependant, le diagnostic biologique de l’hypothyroïdie est peu satisfaisant, tous les auteurs s’accordent sur ce sujet. En effet, le taux de T4 est variable au cours de la journée, il varie en fonction de nombreux paramètres (maladie chronique, traitements antibiotiques, phénobarbital…). Il existe de nombreux faut négatifs (hypothyroxinémie secondaire). Par ailleurs, un taux de TSH bas n’exclue pas l’hypothèse d’une hypothyroïdie, car le pourcentage de faux négatifs atteindrait 40% [Prélaud].

 

Limite du diagnostic thérapeutique

Un diagnostic thérapeutique peut être alors proposé [Héripret] qui consiste à supplémenter en lévothyroxine l’animal et de suivre son évolution clinique (et comportementale) pendant deux mois, puis de suspendre l’administration pour constater si oui ou non les signes cliniques réapparaissent. Toutefois, ce « test thérapeutique » prête à discussion en raison de l’action même des hormones thyroïdiennes qui apportent un bénéfice évident chez un chien « déprimé » (action stimulante).

Quand savoir alors si un chien avec des signes cliniques et comportementaux compatibles avec l’existence d’une hypothyroïdie, avec des concentrations plasmatiques de T4 et de TSH normales et répondant positivement à une supplémentation en lévothyroxine est effectivement hypothyroïdien ? Par ailleurs, les signes cliniques de l’hypothyroïdie sont très variés : seulement 40% des chiens hypothyroïdiens montre un surcroit pondéral [Feldman], une maigreur en relation avec une amyotrophie peut constituer aussi un signe comme c’est le cas en médecine humaine. De la même façon, l’état dépressif n’est pas un signe constant dans l’hypothyroïdie : l’hyperactivité fait partie des signes d’hypothyroïdie décrit chez le chien [Le Taron], hyperactivité améliorée quand le chien mis sous lévothyroxine [Courtin-Donas]. Enfin, l’apparition de réactions agressives (agressions par irritation et par peur) constitue un motif fréquent de consultation de comportement chez des chiens qui se révèlent être hypothyroïdie, agressivité qui diminue quand le chien reçoit de la T4.

 

Entre la démarche diagnostique et la démarche thérapeutique

En médecine comportementale, l’objectif de la consultation est d’établir un diagnostic pour effectuer un choix raisonné des thérapeutiques à mettre en œuvre (thérapie comportementale et psychotropes). Implicitement, le but est d’améliorer le comportement du chien en le soignant. En pratique, devant une situation de crise (demande urgente, risque d’abandon ou d’euthanasie), face à un chien au « profil d’hypothyroïdien », il me paraît évident que la démarche clinique et thérapeutique prime sur la démarche diagnostique.

 

Le syndrome Hypolit

Comme le débat sur le diagnostic de l’hypothyroïdie chez le chien est loin d’être clos et qu’il me semble prioritaire de soigner les chiens qui souffrent de troubles du comportement sous peine qu’ils soient abandonnés ou euthanasiés, j’ai proposé de nommer syndrome Hypolit (hypothyroidism like trouble) l’affection qui regroupent des signes cliniques et comportementaux d’hypothyroïdie, qui rétrocèdent à une supplémentation à une lévothyroxine, mais dont le diagnostic n’est pas confirmée par les valeurs de T4 et de TSH.

L’évolution comportementale de l’animal permet d’apprécier rapidement et parfois très finement l’intérêt de la supplémentation en lévothyroxine pour un chien donné. En effet, une étude prospective a montré la rapidité d’action de la lévothyroxine, notamment sur les signes comportementaux (16 cas, observation pendant 4 semaines de supplémentation, puis après 1 semaine sans T4) [Courtin-Donas] : en moins de deux semaines, la diminution des signes comportementaux était nette, les troubles réapparaissant à l’arrêt. Une grille de suivi clinique et comportementale (24 items) avait été utilisée dans cette étude (elle a été depuis complétée).

 

Références bibliographiques

  • Collectif. Hypothyroïdie canine. Journée du GEDAC du 18 septembre 2008. Procced.
  • Courtin-Donas S. Troubles du comportement améliorés par la lévothyroxine chez le chien : étude expérimentale. Lyon. Janvier 2009.
  • Dramard V., Benoit E. Endocrinologie canine et féline. Comportement: une approche des dysendocrinies. Point Vét., 2004, vol.35, n°spécial: les traitements en comportement du chien et du chat, 40-43.
  • Dramard V. vade-mecum de pathologie du comportement du chien et du chat. Ed Med’com. 2ème édition. Paris. 2007.
  • Garnier F. et coll. Endocrinologie des carnivores domestiques : quoi de neuf. La dépêche vétérinaire. Supplément technique. N° 106.2007.
  • Le Taron G. and coll. Clinical Evaluation of a novel liquid formulation of L-thyroxine for once daily treatment of dogs with hypothyroidism. J.Vet.Inter. med. 2009 ;23 :43-49.

 

 

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